L’attachement aux autres, notamment aux figures parentales, familiales, au partenaire de vie et aux amis proches est un comportement humain. Il n’y a pas de lien affectif fort sans attachement. L’attachement crée le manque, le besoin d’être avec l’autre. On peut se sentir dépendant de l’autre car l’autre nous manque, et qu’on ne s’imagine pas sans cette personne à nos côtés. Mais la dépendance affective dont on parle souvent par son caractère pathologique engendre bien d’autres aspects.

La dépendance affective est un comportement qui manifeste une quête de reconnaissance insatiable, un attachement aveugle et irraisonné à une personne. Elle entraîne une tendance à prioriser les besoins et les intérêts de l’autre au détriment des siens et à ne pouvoir concevoir sa vie sans l’autre.

Selon les individus, elle se manifestera différemment. Certains montreront un caractère indépendant par rapport à leur famille et leurs amis, et pourtant témoigneront d’un surinvestissement au niveau de l’attachement au partenaire de vie. On parlera de dépendance émotionnelle au couple. L’effet particulièrement pervers de ce type de dépendance affective est de remettre dans les mains de l’autre son bonheur et le comblement de ses besoins, car il accentue encore le sentiment d’insécurité et d’incapacité à pouvoir être heureux seul. Il s’ensuit un comportement délétère pour la personne qui soit développe de la jalousie excessive soit un comportement soumis où elle se met à accepter l’inacceptable.

D’autres vont conserver un attachement excessif à leur famille. On parlera de dépendance émotionnelle à la famille. De par leur éducation qui les a surprotégés par le biais de parents anxieux de tout, ils n’ont pas pu expérimenter le monde et les relations humaines comme les autres. Ils ont grandi avec une vision du monde angoissée et angoissante, et ont trouvé refuge dans le cocon familial. En grandissant, ils n’ont pas passé totalement le cap de l’individuation (capacité à développer une personnalité à part entière vis-à-vis des parents) et restent cramponnés au nid familial pensant à tort qu’il est le seul lieu où ils sont protégés.

D’autres enfin vont manifester un besoin exagéré de reconnaissance sociale. Il s’agit de dépendance émotionnelle à l’environnement social. Il est humain de mal vivre le rejet de la société. En effet, en analysant le cerveau humain on se rend compte que lorsqu’une personne est éjectée d’un cercle social, la partie de son cerveau qui réagit est la même que la partie associée à la douleur physique. En conséquence de cela, la peur du regard d’autrui, qui peut engendrer la critique et l’exclusion du cercle social, est la peur la plus importante pour un être humain. Mais si cette peur n’est pas maîtrisée faute d’avoir suffisamment confiance en ses propres capacités et ressources, elle peut déboucher sur un besoin d’approbation permanent, manifesté par un comportement servile et prêt à renoncer à ses valeurs et ses convictions.

Ils sont nombreux. On peut en manifester beaucoup mais pas nécessairement tous, et l’intensité est variable selon les personnes :

• Difficulté voire incapacité de prendre une décision seul(e), nécessité de recueillir l’avis de l’autre


• Difficulté à formuler une opinion différente de l’autre


• Besoin de l’approbation de l’autre


• Besoin de l’attention permanente de l’autre


• Tendance à l’auto sabotage par nécessité d’obtenir satisfaction à court terme pour nourrir son besoin affectif plutôt que de tenir certains efforts dans la durée


• Répétition des mêmes schémas


• Tendance à être trop gentil et difficulté à dire « non »


• Tolérance à des comportements humiliants voire violents


• Tendance à excuser systématiquement l’autre dans tous ses comportements déviants


• Faire tourner sa vie autour de l’autre et négliger les autres personnes autour de soi


• Ne pas imaginer pouvoir vivre sans l’autre et donner une importance démesurée à la relation


• Idéaliser la relation


• Isolement social


• Relation fusionnelle avec manifestation de jalousie et de chantage affectif


• Besoin insatiable d’être rassuré(é) sur le fait que l’autre nous aime


• Incapacité à rester seul(e)


• Difficulté à recevoir un refus de l’autre

On recense plusieurs causes à la dépendance affective, qui peuvent s’additionner les unes aux autres. En voici les principales :

• Le manque de confiance en soi et le manque d’estime de soi : c’est LA cause principale qui revient systématiquement. Elle peut être induite par une éducation rigide, ou à l’inverse trop laxiste, ou par des parents anxieux manquant eux-mêmes de confiance en eux et en la vie. Les expériences malheureuses peuvent également fragiliser la confiance et l’estime de soi.


• La blessure d’abandon ressentie comme une marque de désamour de la part de l’autorité parentale : elle créé une faille au niveau de la construction de l’attachement sécure (sécurité intérieure). En conséquence de cela, la personne montre des signes d’anxiété, manque de confiance en elle et remet dans les mains du partenaire son besoin d’être constamment rassurée et sa capacité à mériter de l’affection et de l’amour.


• L’immaturité psychique : la personne réagit encore comme une jeune personne, ne gère pas ses émotions correctement. Elle a besoin de réconfort et de soutien, et s’en remet aux autres. Elle éprouve des difficultés pour s’autogérer et s’affirmer.


• L’hypersensibilité : la personne est à fleur de peau avec ses émotions. Elle éprouve des difficultés à prendre du recul et est assujettie à ses émotions de l’instant. La moindre émotion prend des proportions exagérées, ce qui la conduit à des comportements de panique et un besoin de réconfort encore plus vif quel qu’en soit le prix.


• Le souvenir d’expériences douloureuses : une séparation mal vécue, un deuil non fait va créer une fragilité au sein de la personne. Voulant à tout prix éviter la douleur que peut procurer une nouvelle séparation ou la fin de quelque chose, la personne préférera supporter une situation inadaptée voire toxique.


• La peur de vivre seul, du regard des autres : l’individu est préoccupé par son image sociale, sa reconnaissance. Il est prêt à se maintenir dans des situations personnelles ou professionnelles douloureuses pour sauver les apparences et se conformer à ce qu’il croit devoir être. Il néglige ses propres besoins au profit de ceux des autres. Il nie son authenticité à tel point qu’il peut un jour expérimenter un burn-out ou tomber en dépression sans trop comprendre pourquoi.


• Le conflit de loyauté : la personne s’interdit de vivre ce qu’elle voudrait pour ne pas décevoir son père ou sa mère, arguant que « ça ne se fait pas  ». Elle reste fidèle à un modèle qui ne lui correspond pas, mais ne peut imaginer qu’il en soit autrement.

Sortir de la dépendance affective commence déjà par la prise de conscience qu’on est dans ce type de comportement. Ensuite, il sera nécessaire d’identifier la ou les causes qui entraînent ce comportement : manque de confiance en soi, anxiété, désamour, mauvaises expériences, croyances limitantes...

L’aide d’un thérapeute qualifié peut être recommandée pour les identifier clairement, car certaines peuvent être bien enfouies dans l’inconscient, et ce n’est pas toujours simple de les ramener à la conscience uniquement par soi-même.

Une fois les causes identifiées, il devient alors possible de les traiter. Il peut s’agir de :

• remettre en question une croyance qui nous parasite
• apprendre à gérer ses émotions
• travailler sur son estime de soi et sa confiance en soi
• apprendre à dire « non » et à s’affirmer
• s’autoriser à avoir de la valeur et s’écouter
• retrouver son autonomie
• s’ouvrir aux autres et au monde extérieur